Restauration par le génie végétal

Les techniques de génie végétal appliquées aux berges de cours d’eau sont susceptibles de participer activement à la restauration du caractère fonctionnel des ripisylves (retour de la biodiversité, restauration des fonctions de corridor, résistance aux espèces exotiques envahissantes…) tout en répondant à la demande sociale de protection contre les risques d’érosion.

 

Par exemple, dans les vallées alpines urbanisées, les ripisylves constituent parfois le dernier corridor biologique permettant la circulation des espèces le long de la vallée. C’est aussi le cas dans les zones de plaine très urbanisées ou dans certaines grandes plaines céréalières.

Les ripisylves comme derniers corridors boisés, vallée de l’Arve au niveau de Scionzier (74). © Jean-Michel Olivier.

Rupture de la continuité écologique au niveau de l’enrochement à droite sur la photo. © Géni’Alp.

 

Or, lorsque les berges sont enrochées, l’absence de végétation, donc de couvert, entraîne une discontinuité des corridors biologiques. En plus, les températures élevées observées en été sur les rochers et l’absence de végétation rendent ces milieux peu propices à l’accueil et à la circulation des espèces animales et végétales.

Mais les travaux de restauration menés sur ces milieux le sont souvent sans une bonne connaissance de leurs structures et de leur fonctionnement, notamment en ce qui concerne les fonctions de corridor et leur connexion avec le paysage. La restauration des berges de cours d’eau permet souvent de rétablir la continuité du linéaire boisé, mais l’effet de cette restauration sur la fonctionnalité des corridors demande à être précisée.

Pour mieux caractériser ces effets, des études ont été menées sur des berges aménagées en génie civil, en génie végétal (fascines) ou avec des techniques mixtes. Pour cela, des relevés de végétation et topographiques ont été réalisés au niveau des ouvrages et sur les berges en amont et en aval de ceux-ci.

Les résultats montrent que pour les ouvrages en génie civil, la couverture végétale (abondance) tend à être moins importante au niveau de l’aménagement que sur les berges adjacentes, alors que pour le génie végétal, celle-ci paraît continue de l’amont à l’aval de l’ouvrage. On peut mettre ces résultats en relation avec l’apport de matériel végétal lors de la réalisation des ouvrages et l’inhospitalité des enrochements pour les espèces. Pour les ouvrages où des techniques mixtes ont été mises en œuvre, on observe une tendance à un couvert végétal plus important au niveau de l’ouvrage, montrant qu’ils peuvent permettre de restaurer un couvert dans des zones où celui-ci est faible, ce type d’ouvrage étant retrouvé préférentiellement dans les zones fragmentées, en milieu urbain ou périurbain.

La pente des berges a également été étudiée car elle peut influer sur la dynamique de certaines espèces circulant sur les berges de rivières. Ainsi, des pentes trop importantes constituent des barrières pour la dispersion de certaines espèces et réduisent la connectivité latérale et longitudinale. Dans le cadre de cette étude, il a été montré que la pente était plus importante au niveau des aménagements en génie civil que sur certaines berges contigües. Pour les ouvrages en génie végétal et en techniques mixtes en revanche, on n’observe pas de différence de pente entre les différentes parties de la berge.

En somme, ces résultats montrent que les aménagements en génie végétal sont ceux qui ont le moins d’impacts sur la continuité des corridors rivulaires. Dans une moindre mesure, les techniques mixtes possèdent également des caractéristiques pouvant être bénéfiques à la connectivité des ripisylves, en particulier au niveau des zones urbanisées où on les retrouve préférentiellement. Les enrochements apparaissent eux comme le type de structure impactant le plus fortement la connectivité des berges.

     

Pour aller plus loin

Fremier, A. K., M. Kiparsky, S. Gmur, J. Aycrigg, R. K. Craig, L. K. Svancara, D. D. Goble, B. Cosens, F. W. Davis & J. M. Scott, 2015. A riparian conservation network for ecological resilience. Biological Conservation 191:29-37.

Martin, F.-M., Evette, A., Bergès, L. (Soumis). Pour une meilleure prise en compte de la connectivité écologique dans l’aménagement et la gestion des berges de cours d’eau. Sciences Eaux & Territoires

Martin, F.-M., Janssen, P.,  Bergès, L., Dupont, B., Evette, A. (Soumis). Higher structural connectivity and resistance against invasions of soil bioengineering over hard-engineering for riverbank stabilisation.

Trame verte et bleue : Centre de ressources http://www.trameverteetbleue.fr/

Ward, J. V., K. Tockner, U. Uehlinger et F. Malard (2001). Understanding natural patterns and processes in river corridors as the basis for effective river restoration. Regulated Rivers: Research & Management 17(4‐5): 311‐323.